La Ligue contre la violence routière demande l’interdiction totale de la vente de protoxyde d’azote aux non-professionnels
On en entend énormément parler depuis quelques jours : le protoxyde d’azote. Ce gaz hilarant serait impliqué dans la mort de 3 jeunes à Alès. Depuis plusieurs années, la Ligue contre la violence routière dénonce les dangers du protoxyde d’azote. On en parlait ce matin dans le Grand Réveil avec notre invité.
Son N°1 - La Ligue contre la violence routière demande l’interdiction totale de la vente de protoxyde d’azote aux non-professionnels
Jean-Yves Lamant - président de la Ligue contre la violence routière au niveau national et trésorier de l’antenne mosellane
Pour commencer, le protoxyde d'azote, c'est quoi ? Pourquoi, c'est tellement dangereux ?
C'est d'abord un gaz qui est utilisé en anesthésie, en médecine et c'est un gaz propulseur pour les aérosols et les bombes de crème chantilly dont l'usage, malheureusement, est détourné pour provoquer des effets euphorisants très rapides. Il dure en fait environ une minute. Le problème, c'est que c'est un addictif très puissant comme une drogue, et cela provoque des séquelles fortes chez les jeunes qui l'inhalent, soit avec des cartouches, soit avec des ballons. Et la Ligue considère que ce produit doit être absolument interdit compte tenu de ses effets dévastateurs sur la santé.
Est-ce qu'on a aujourd'hui une idée finalement de l'ampleur du problème ? Est-ce qu'il y a un vrai phénomène de consommation de protoxyde d'azote ?
Oui, il y a beaucoup d'études qui documentent ça. 14% des jeunes de 18 à 24 ans ont déjà expérimenté ce produit. Alors 14% ça ne veut pas dire grand chose, mais si on donne un chiffre, c'est 800 000 personnes par an et la moitié ont déjà conduit en ayant inhalé du protoxyde d'azote, ce qui provoque des troubles cognitifs, des troubles du comportement, des troubles du contrôle, et qui fait qu'on est totalement irresponsable et dangereux au volant. Donc voilà l'ampleur du phénomène.
Justement, la Ligue contre la violence routière fait des demandes concrètes concernant le protoxyde d'azote en France. Qu'est-ce que vous demandez ?
Alors la Ligue demande clairement trois choses. La première, c'est l'interdiction totale de la vente de ce produit contenu de tous les effets dévastateurs que je viens de dire aux non-professionnels, puisqu'il peut y avoir encore quelques médecins ou quelques fabricants de crème chantilly, par exemple, qui souhaitent l'utiliser. Donc il faut que cette interdiction soit totale. On demande aussi qu'en attendant la détection, parce que le problème, c'est que ce produit ne peut pas être détecté au-delà de quelques minutes après son inhalation, donc on demande qu'en attendant cette détection, on puisse interdire et sanctionner l'utilisation de ce produit en constatant le fait qu'on le transporte et on le possède dans la voiture, par exemple. Ce qui aujourd'hui n'est pas le cas, puisque la loi ne le permet pas. Mais la loi, elle permet, par contre, proto ou pas, la loi permet de sanctionner un conducteur qui est en état d'abolition manifeste de ses facultés, même sans test. Donc c'est l'ivresse manifeste qui peut être constatée. Et l'argument, tant qu'on ne mesure pas, on ne peut rien faire, n'est pas sérieux. Donc on dit qu'il y a des solutions intermédiaires. Et la troisième chose, c'est que la Ligue demande que le protoxyde d'azote soit inscrit dans la liste des drogues et que le gouvernement publie au plus vite le décret qui liste les substances psychoactives, incluant le protoxyde d'azote, qui permettent d'être une circonstance aggravante pour des homicides routiers, en particulier, puisque la loi aujourd'hui inclut ces substances psychoactives comme circonstances aggravantes. Le problème, c'est que le décret aujourd'hui listant tous ces produits n'est pas encore paru. Et on prête le gouvernement de le faire.
Après l'accident qui a coûté à la vie à trois jeunes à Alès, il y a eu quand même des choses, des arrêtés qui ont été pris pour encadrer la consommation de gaz. Est-ce que ça va dans le bon sens ? Est-ce que pour vous c'est assez ? Est-ce qu'il faut aller plus loin ?
Bien sûr que ça va dans le bon sens. Et ça va dans le bon sens parce qu'en fait le gouvernement ne va pas assez vite. Donc les responsables dans les territoires prennent leurs responsabilités et prévoient des arrêtés, soit municipaux, soit préfectoraux, pour interdire non seulement la consommation sur l'espace public, mais la détention et le transport.
Au niveau local, on en parle également depuis plusieurs années, notamment avec le combat des parents de Kenny, tué dans un accident de la route. Ils ont notamment créé une "main tendue" et se mobilisent justement pour faire reconnaître la dangerosité de ce protoxyde d'azote. Est-ce qu'il faut arriver à l'accident pour malheureusement prendre conscience de ce problème ?
D'abord je vais leur rendre hommage, à leur action courageuse depuis plusieurs années, ça fait maintenant plus de cinq ans. Ils font des choses efficaces, c'est-à-dire témoigner. Et pour les jeunes, c'est extrêmement important d'avoir des témoignages vivants et réels. Les jeunes sont plus sensibles aux arguments rationnels et donc ils font un travail remarquable pour ça. Et je pense que ce qu'il faut qu'on fasse, c'est qu'on informe. Aujourd'hui, un tiers des Français ignorent complètement même l'existence de ce produit et les ravages qu'il peut provoquer sur la santé.


