Entre augmentation de l'énergie et des matières premières, les boulangers ne s'en sortent plus


par Margot Benabbas
mercredi 4 janvier 2023 à 15:51

Entre augmentation de l'énergie et des matières premières, les boulangers ne s'en sortent plus

La situation des boulangers est particulièrement difficile avec la hausse des coûts de production et de l’électricité. De nombreuses boulangeries ont fermé ou vont être obligées de fermer en ce début d’année.

Son N°1 - Entre augmentation de l'énergie et des matières premières, les boulangers ne s'en sortent plus

Mickaël Reutenauer – président de la corporation des boulangers du secteur de Saverne

Quelle est la situation chez les boulangers du Bas-Rhin ? Des boulangers ont-ils jeté l’éponge ?

Alors, oui, bien sûr, c’est très très compliqué actuellement. On a déjà des collègues qui, malheureusement, ont dû baisser le rideau, ça, c’est clair, depuis le mois d’octobre, avec ces hausses qui n’ont aucun sens. Donc il y a pas mal de boulangers qui sont actuellement dans de très grosses difficultés. Notamment au niveau de la trésorerie, avec le prix de l’énergie qui, pour certains, a fait x 10, et qui sont juste insupportables, et qui ne permettent pas de pouvoir survivre.

Hier, les boulangers ont été reçus par le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, qui a annoncé plusieurs mesures dont la possibilité de résilier les contrats trop contraignants sans frais. C’est une bonne chose ?

Alors, ça déjà, c’est une bonne chose. Il faut savoir aussi, que les mesures qui ont été mises sur la table hier par le ministre, monsieur Bruno Le Maire, ne sont pas encore officielles, c’est uniquement mis sur la table pour la forme. Donc on ne peut pas, tout de suite, crier que c’est de l’acquis. Effectivement, c’est un sujet qui était important, parce que, actuellement, en tant que boulanger, vous recevez, surtout pour ceux qui sont arrivés à la fin de leurs 3 ans, reçoivent leur nouveau contrat. C’est là, qu’on peut constater qu’il y a des hausses, parfois, x 8, x 10. On a des collègues qui sont passés de 1 200 € par mois, à 10 800 € par mois. C’est insupportable. On n’a pas d’autres choix que de résigner un nouveau contrat. Ce contrat, on est obligés de le signer, sinon on n'a plus de courant. Et un boulanger qui n’a plus de courant, n’a plus d’énergie, ne peux plus produire, donc est obligé de fermer boutique. Donc c’est vrai que c’est quelque chose qu’il serait important de renégocier, d’ici quelques mois, lorsque ça ira mieux, ce qu’on souhaite, et qu’on aura une visibilité un peu plus logue. Et de pouvoir revenir sur ces tarifs-là, ça me paraissait très très important. 

Elisabeth Borne a également annoncé des choses pour les boulangers : les boulangers pourront reporter le paiement de leurs impôts et cotisations sociales et étaler leurs factures d’électricité sur les premiers mois de l’année. Est-ce suffisant ?

Alors ça, c’est une mesure qui a été prise dans l’urgence, parce qu’on a beaucoup de collègues qui, actuellement au niveau de la trésorerie, n’y arrivent plus, tout simplement. Ils sont arrivés à sec, ils n’ont quasiment plus de trésorerie. Donc c’est une mesure qui va permettre, simplement, de pouvoir continuer l’activité, mais qui ne résout en rien le problème. Parce que c’est simplement un report de charges, ce n’est pas une aide de l’état. C’est-à-dire que c’est un étalement comme on l’a connu durant la période du Covid, où beaucoup de mes collègues ont fait des reports de charge également, et, 2 ans plus tard, ont dû commencer à les payer. C’est quelque chose qu’il faudra, de toute façon, payer. Ce n’est pas du tout une aide. C’est simplement un report pour pouvoir souffler un petit peu, et avoir un peu de trésorerie, et surtout, continuer à exercer notre profession, le temps qu’on trouve les solutions nécessaires. 

Vous êtes vous-même boulanger, comment ont évolué vos factures ces derniers mois ?

Pour vous dire ; ça n’a aucun sens. J’ai 3 boutiques. J’en ai une où j’ai mon lieu de production, à Saverne, j’ai 40 collaborateurs avec moi. Cette boutique-là, j’avais renégocié il y a 1 an, donc c’est un prix qui a été bloqué. Donc j’ai une augmentation, bien sûr, comme partout, mais qui est limitée. On sait qu’il y aura une augmentation, mais elle est légère, elle est supportable. Par contre, pour la boutique que j’ai au centre-ville, et la boutique que j’ai sur Otterswiller, malheureusement, j’étais arrivé également en fin de contrat. J’ai dû renégocier, et là, c’est carrément, sur la boutique de Saverne, ça a été multiplié par 14, et sur la boutique d’Otterswiller, par 12. Donc c’est totalement insupportable. Donc il faut savoir que ces augmentations-là, de x 14, x 12, c’est pour les mois de novembre, décembre, janvier, février et mars. Ensuite, on repasse en heure d’été, et ça recommence à partir du premier novembre. On a dû prendre des mesures très simples pour ces boutiques-là. Au mois de février, ce qui n’était pas du tout prévu, c’est que ces boutiques-là, seront fermées et le personnel sera en congé.

Cette semaine, c’est l’épiphanie, pourquoi faut-il acheter une galette chez nos artisans boulangers ?

Pourquoi c’est important ? Déjà pour les soutenir. Il faut bien penser à une chose ; on a eu l’augmentation de l’énergie, mais on a également la hausse des matières premières, qui est incroyable. Le beurre a plus que doublé en 1 an. Il faut savoir qu’un artisan qui fait ses propres galettes, parce qu’on est quand même très nombreux, on est 33 000 France, à produire nos propres galettes. On utilise du beurre, on utilise des amandes, des matières nobles. On fait de l’artisanat, on veut faire de la qualité, et il faut les soutenir, il faut acheter chez eux. C’est très important de nos jours, on a besoin de nos clients, qui nous soutiennent, qui montrent vraiment qu’ils sont solidaires avec nous. On fait du mieux possible, on attend aussi un soutien de nos clients. Il faut qu’ils comprennent, qu’actuellement, les boulangers sont en danger, notamment les petites boulangeries qui sont dans les villages, sont vraiment en grand danger. Donc il faut vraiment les soutenir. Allez dans vos villages, allez chez votre boulanger du quartier, chez le boulanger du coin, c’est très très important ! Ils ont besoin de pouvoir survivre et de pouvoir continuer à exister.


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